Un travail en régression...
Ou plutôt comme un retour : celui de chaque interprète sur son propre parcours,
un journal intime chorégraphique, des bribes d’autobiographies,
un travail sélectif sur la mémoire, une introspection publique.
Il est question d’apprentissage, d’assimilation, de formation, de progression,
de « comment se fait-on ? », comment un interprète se fabrique :
entre démarche personnelle et hasard des rencontres.
Mais il est question aussi du pendant de cette courbe ascendante :
la perte, la stagnation, les accidents de parcours… la régression.
De la même façon qu’en pédagogie la stagnation fait partie intégrante du processus d’apprentissage, on pourra se demander si la régression, même dans son pire aspect infantile, n’a pas aussi quelque chose à nous apprendre.
La régression pose la question de l’âge du danseur : passé l’âge symbolique de la quarantaine, est-il sur la voie du déclin, ou est-ce que sa maturité en fait un témoin privilégié de sa pratique, de son propre parcours ? Est-ce un corps vieillissant ou un artiste mûrissant ?
La régression pose aussi la question de la « progression » attendue d’un spectacle, de son ascension, vers le plus, vers le mieux, vers un climax incontournable. Nous tenterons bien sûr de déjouer, de façon ludique, cette évidence.
Enfin, (to) work in regress, c’est travailler dans un contexte de régression (sociale, politique, culturelle...). En quoi cette idée de travailler ensemble, quand un contexte d’économie culturelle régressive qui ne nous y incite pas, est peut-être un acte de résistance en soi ?
Alors, work in progress ou work in regress ? Simple question de goût ? On pourrait rétorquer par le principe d’équivalence de Robert Filliou, artiste du mouvement Fluxus : « bien fait, mal fait, pas fait », c’est la même chose. Pour ce projet, cinquième pièce d’un parcours chorégraphique de dix ans, j’ai voulu pour la première fois m’extraire du plateau et mettre en scène des personnes que je connaissais pour les avoir croisées dans différents projets, à travers mon parcours d’interprète (jusque-là c’est mon corps et mon mouvement que j’utilisais comme matière première, comme matériau au même titre que les objets scénographiques).
Il s’agissait de mettre à jour leurs identités respectives, de dresser leur portrait, et de les faire témoigner, prendre « la parole » (mais aussi le geste, le son, la lumière...), afin de leur faire décrire le parcours qui est le leur, le chemin par lequel ils se sont construit en tant qu’interprète, humainement, artistiquement, techniquement... Montrer ces parcours tels qu’ils sont : des lignes accidentées et discontinues, faites de rencontres formatrices, d’accomplissement, mais aussi de temps morts, de doutes, de ratés, de fausses notes, de stagnations, de régressions.
Nicolas Hubert
Work in regress (?) est le titre malicieux de la pièce que Nicolas Hubert crée dans le cadre de sa résidence à Echirolles, près de Grenoble. Tous les branchés de la danse vous diront leur passion, au contraire, pour les work in progress, qui révèlent la richesse des processus de création. Nicolas Hubert explique que le regress qu’il travaille désigne un retour de chaque interprète sur son propre parcours.
Danser - janv. fév. 2012
La perte, l’échec et le recul, tout comme le progrès et la gloire, ont quelque chose à nous apprendre des artistes, de la création et de nous-mêmes.
Les Affiches de Grenoble 18 nov. 2012
Une chorégraphie expressive, écorchée, tout en rythmes et en ruptures, en élans et en murmures, comme le témoignage de l’intensité d’une rencontre artistique.
[…] Utopique et essentiel. Un antidote au renoncement quotidien.
Journal de la Ville d’Echirolles déc. 2011
La Rampe – La Ponatière, scène conventionnée, Echirolles (38) (dans le cadre de la résidence triennale de la compagnie épiderme) / Le Pacifique|CDC Grenoble
Avec le soutien de la Ville de Grenoble, du Conseil Général de l’Isère,
du Conseil Régional Rhône-Alpes, et de la DRAC Rhône-Alpes.